
Grâce aux résultats de ses nombreuses réformes, l’Éthiopie a la croissance économique la plus rapide au monde, selon l’édition 2017 du Global Economic Prospects de la Banque Mondiale. Le géant est-africain se positionne pour occuper la première place de l’économie du continent en relevant ses faiblesses structurelles.
Dans le cadre d’un programme soutenu par l’Agence française de développement (AFD), les chercheurs de l’Ethiopian Development Research Institute (EDRI) montrent que la politique volontariste du gouvernement éthiopien attire les investisseurs et dope les exportations. Une stratégie qui met l’économie éthiopienne «sur la bonne voie».
Selon cette étude, la part de l’industrie manufacturière dans le PIB de l’Éthiopie tourne autour de 5 %, par rapport à la moyenne en Afrique subsaharienne (autour de 8-10 %). Le constat est le même pour les cibles en matière d’exportations.
La trajectoire de développement du secteur manufacturier en Éthiopie :

En matière de coût unitaire du travail, l’Éthiopie reste compétitive par rapport au Kenya, à l’île Maurice, à l’Afrique du Sud, et au Vietnam, où les salaires ont augmenté plus vite que la productivité, mais elle l’est moins que le Botswana, l’Indonésie et la Chine, où comparativement à l’Éthiopie, la productivité augmente encore plus vite que les salaires.
«Cela reflète un manque d’investissement dans les services et infrastructures de base», analyse Gaëlle Balineau, économiste du développement à l’AFD. Les acteurs du secteur privé, des associations professionnelles et de certaines institutions gouvernementales tiennent le même langage.
«la défaillance des infrastructures (coupures d’électricité, coûts logistiques et de transport), le manque de qualification de la main-d’œuvre, et la mauvaise qualité des matières premières éthiopiennes restent les problèmes majeurs de l’économie éthiopienne.» – Tigabu Degu Getahun, chercheur à l’Ethiopian Development Research Institute (EDRI)
Face à ces faiblesses structurelles, le gouvernement de Mulatu Teshome essaie de trouver des solutions. Il déploie une série d’incitations fiscales et non fiscales pour attirer les investissements directs de l’étranger et inciter les entreprises à exporter.
Pour Tigabu Degu Getahun, chercheur à l’EDRI, cette politique apparaît très coûteuse au regard des résultats et prive l’État des ressources budgétaires nécessaires pour investir dans les biens publics, comme le demandent les entreprises.
Par exemple, pour profiter des exemptions de taxes sur les intrants, certaines entreprises s’enregistrent en tant qu’entreprises exportatrices, alors que dans les faits elles importent. Plusieurs se déclarent ensuite en faillite et renaissent sous un autre nom pour profiter des largesses de l’État.

En effet, les incitations à exporter ne suffisent pas à contrecarrer le «biais anti-exportations». La surévaluation du birr (devise éthiopienne), les droits de douane à l’import, ainsi que les barrières non tarifaires à l’export (coûts de transport et logistiques, délais en douane), créent en fait une préférence pour le marché national.
En 2016, l’Éthiopie a récolté 3,2 milliards de dollars d’investissements directs étrangers. Entre 2010 et 2015, elle a connu une croissance moyenne de 10% et de 6,5% en 2016, dépassant tous ses concurrents. Toutefois, la faible capacité de mise en œuvre et l’absence de motivation et de coordination au sein de ses institutions sont des obstacles majeurs à l’efficacité de sa politique industrielle.