Suite au Live Tweet organisé le 8 mars dernier par INTER’ACTES et Madame Digitale, à l’occasion de la Journée internationale des Droits de la Femme, nous vous proposons une série de portraits des participantes à cette discussion interactive. 

 

Au Mali, en matière de lutte pour la liberté d’expression et pour un meilleur accès au numérique, Fatouma Harber est une des blogueuses et activistes les plus dynamiques de sa génération. Enseignante, webactiviste et militante des droits de l’homme, elle a fondé SankoréLabs, un incubateur qui vise à réduire la fracture numérique. Portrait.

Originaire du Mali, Fatouma Harber est une femme aux nombreuses casquettes. Co-créatrice de Doniblog, une communauté qui lutte pour la liberté d’expression et la promotion des outils numériques, elle est également co-fondatrice du collectif#Mali100Mega, qui milite pour que les Maliens aient accès à une connexion moins chère et de meilleure qualité. Avec l’incubateur Sankoré Labs, elle veut continuer à poser des actes concrets dans la transformation de la société malienne.

 

Quand elle parle de son parcours, Fatouma Harber le décrit comme étant peu commun. Ayant passé une partie de son enfance au Niger, elle a poursuivi ses études universitaires au Mali. Là-bas, elle s’est spécialisée dans le développement local, l’éducation, les TIC et la communication. Ainsi, ce sont ces thématiques qui l’ont peu à peu poussée vers le monde digital.

Très attachée à ses origines, Fatouma Harber est ici en discussion avec deux grands écrivains de Tombouctou : Salem Ould Elhadj et Aly ould Sidi.

Mais c’est certainement l’année 2012 qui marque un grand tournant dans sa vie. Cette année-là, le Mali est en proie à une grave crise sécuritaire et politique, liée aux attaques de groupes armés dans le nord du pays et à un coup d’Etat. Face à cette instabilité et à la peur ambiante qui en a découlée, Fatouma décide de documenter les tourments de son peuple via son blog et son compte Twitter.

« Du jour au lendemain, nous nous sommes retrouvés coupés du monde, avec pour seules autorités des barbus venus d’autres frontières. Je me suis dit qu’il fallait communiquer au reste du monde les conditions dans lesquels nous étions ». – Fatouma Harber

Depuis lors, Fatouma ne rate plus aucune occasion de s’exprimer sur ce qui se passe dans son pays, considérant qu’il s’agit d’un droit essentiel pour une société saine et démocratique. Qu’il s’agisse des exactions contre les femmes, de la scolarisation des petites filles, de l’autonomisation des jeunes ou de l’accès à l’information, elle aime diversifier les causes pour lesquelles elle s’engage.

En 2016, elle a co-créé Sankoré Labs, un incubateur où entrepreneurs, créatifs et innovateurs peuvent développer leurs activités et participer activement à un renouveau pacifique. Plusieurs des projets soutenus par ce hub sont d’ailleurs mis en place à Tombouctou, ville historique de renommée mondiale qui a particulièrement pâti de la crise sécuritaire en 2012.

Fatouma Harber avec l’équipe Sankoré Labs.

« Le digital est une ouverture extraordinaire pour la transformation des sociétés africaines. Il permet de toucher un plus grand public et surtout de diversifier les cadres d’intervention ». – Fatouma Harber

Cette année, pour récompenser sa contribution à la lutte pour la liberté d’expression dans le monde, Internet Sans Frontières (ISF) a nominé Fatouma Harber au Prix mondial de la liberté de la presse UNESCO/Guillermo Cano 2018. Cette nomination la conforte dans l’idée qu’elle n’a pas eu tort de parfaire ses connaissances en informatique ni de briser le silence sur la situation politique du Mali en 2012. Pour Fatouma, il faut toujours croire en soi et en l’aboutissement de ses projets.