
Contrairement à l’opinion que l’on pourrait en avoir, les arts visuels maliens sont très recherchés et font partie des plus célèbres dans le monde. Que ce soit par le cinéma, la photographie ou la littérature, le Mali se distingue de ses voisins africains et marque le monde de son empreinte.
Le cinéma malien, qui s’est véritablement révélé après la décolonisation, a connu de nombreuses heures de gloire et a souvent été primé lors des grands rendez-vous du 7e art. Mêlant modernité et culture ancestrale, et étant souvent engagé, il est le reflet du dilemme qui se joue dans la majeure partie des sociétés africaines contemporaines : le désir d’ouverture et de « modernisme » face à la nécessité de conserver son identité à travers sa culture et ses mœurs.

Deux réalisateurs ont notamment contribué à exporter le cinéma malien : Souleymane Cissé et Cheikh Omar Sissoko. Le premier a remporté un franc succès avec « Finye », film couronné au festival de Carthage, de Ouagadougou et de Cannes et avec « Yeelen » qui a remporté en 1987 le prix spécial du jury au Festival de Cannes. Ancien ministre de la Culture de 2002 à 2007, Cheikh Oumar Sissoko a mis en exergue les difficultés des citoyens dans ses films. Le plus célèbre d’entre tous est très certainement « Guimba », sorti en 1995 et qui dénonce les abus de pouvoir des hommes politiques. Le film, sélectionné lors du festival de New-York a été couronné au FESPACO et demeure une référence. On peut également citer l’acteur Bakary Sangaré, élu pensionnaire de la Comédie-Française. Il est le premier acteur africain à entrer dans la prestigieuse et tricentenaire troupe française. Le cinéma malien connait malheureusement des revers, tout comme celui de ses voisins africains, faute de moyens lui permettant de s’autofinancer. Il peut néanmoins compter sur les crédits publics qui sont octroyés dans le cadre d’accords de coopération avec des structures étrangères.

La littérature malienne est également riche et fait office de référence dans toute la sous-région. Bien que le pays soit reconnu pour sa tradition orale et que cette culture ait un peu occulté la retranscription écrite des événements, il existe tout de même de très anciens manuscrits qui relatent l’histoire du Mali, certains datant du moyen âge. Écrits en langue arabe, ils témoignaient déjà de la grandeur du royaume et de l’importance qu’il apportait à la transmission du savoir. L’oralité est source d’inspiration pour les écrivains maliens, grâce aux nombreux témoignages transmis de père en fils et retraçant les épopées des héros de l’ancien empire ainsi que les contes et légendes populaires.

De nombreux écrivains, véritables monuments de leur époque, ont contribué à la culture littéraire malienne. Parmi eux, Amadou Hampaté Bâ, qui a consacré sa vie à décrire les traditions culturelles de son pays. Directeur des sciences humaines à l’Université de Bamako, il fut également chargé de recherches à l’Institut français d’Afrique noire auprès de Théodore Monod et obtint une bourse de l’UNESCO, dont il devint ensuite membre. Il fut à l’origine de la transcription des langues nationales comme le fulfuldé (peul). Il est considéré comme l’un des plus grands écrivains africains. Mentionnons également Issa Baba Traoré, dont les œuvres engagées dépeignent la culture malienne, ou encore Yambo Ouologuem, qui a été récompensé en 1968 par le prix Renaudot grâce à son ouvrage sur la condition des Noirs opprimés. Les poètes Fily Dabo Sissoko (La Savane rouge) et Hamadoun Ibrahima Issébéré (Les Boutures du soleil) sont d’autres grands noms de l’art de la plume. Aujourd’hui, Moussa Konaté, auteur de « Le Prix de l’âme » et de « Ils ont assassiné l’espoir », est considéré comme le plus grand écrivain contemporain de son pays. Dans ses œuvres, il explore les problèmes de la société, le poids des traditions, et milite pour la condition des femmes. Il a également écrit plusieurs romans policiers.
L’art pictural malien est représenté par quelques artistes qui se démarquent. On peut ainsi citer d’Abdoulaye Konaté, célèbre pour ses installations et ses grandes tapisseries recouvertes de gris-gris. Ismaël Diabaté et Boubacar Doumbia, dont les travaux sur bogolan sont de véritables chefs-d’œuvre d’originalité. Le sculpteur Amaguihere Dolo, le peintre David Coulibaly ou encore les designers Cheikh Diallo et Aziz Diop avec leurs sculptures modernes (luminaires, couverts…).

Seydou Keita quant à lui a photographié pendant de longues années le quotidien des Maliens, dissimulant ses clichés par crainte de représailles. Sa rencontre avec un photographe français, André Magnin, en 1990 lui permet par la suite d’exposer à la Fondation Cartier de Paris, puis au Guggenheim de New York. Il est assurément l’un des plus talentueux photographes portraitistes du monde et on lui doit, avec Malick Sidibé et Abderrahmane Sakaly, l’essor de la photographie malienne. L’organisation de la Biennale de la photographie de Bamako a vu naitre de nouveaux phénomènes comme Alioune Bâ, Youssouf Sogodogo, Amadou Traoré ou Mamadou Konaté, dont les travaux ont tous fait l’objet de publications.

Le Mali, déjà reconnu pour son histoire, se révèle également un grand pays de culture artistique, littéraire et intellectuelle et demeure une référence sur le continent dans ces domaines, malgré l’insécurité qui prévaut actuellement.
NOTRE SÉLECTION DE FILMS :
- Finzan, de Cheikh Oumar Sissoko (1989) qui est une dénonciation de la pratique de l’excision
- La Genèse, inspiré de la Bible et tourné dans les fabuleux paysages des canyons de la région de Hombori
- Battù, sorti en 2000 avec Danny Glover
- Taafe Fanga (Le Pouvoir du pagne), d’Adama Drabo, qui relate la prise de pouvoir des femmes dans le pays Dogon grâce à un masque, au grand dam des hommes. Ce film a été primé au Fespaco de 1997
- Feel like going home de Martin Scorcese (2004), qui s’interroge sur la parenté existante entre le griot du Mali et le chanteur de blues apparu à la fin du XIXe siècle dans le sud de l’Amérique
- Bamako (2006) du Mauritanien Abderrahmane Sissako, qui met en scène le procès de la société civile contre la Banque mondiale… dans la cour d’une concession.
NOTRE SÉLECTION DE LIVRES :
- Le Devoir de violence. Massa Makan Diabaté a vu son œuvre entière saluée par le premier prix littéraire de la Fondation Léopold Senghor à Dakar en 1987
- Les Contes des sages d’Afrique d’Amadou Hampaté Bâ
- Moussa Konaté L’Empreinte du renard, paru aux éditions Fayard Noir en 2006, où le commissaire Habib mène une enquête passionnante au pays Dogon.
- L’Étrange Destin de Wangrin (1973),
- Sous l’orage, de Seydou Badian Kouyaté
- Amkoulell, l’enfant peul, d’Amadou Hampaté Bâ, mémoires (1991),