Marie-Karelle Koné

Marie-Karelle Koné est une chasseuse de têtes heureuse. Son terrain de jeu est immense. C’est le monde entier qu’elle parcourt pour attirer les meilleurs talents. À faire quoi ? À rentrer en Côte d’Ivoire et aussi dans toute la sous-région. Pour ce faire, elle a fondé la start-up Akwaban’work. Ce nom derive de « Akwaba » qui signifie « bienvenue » en baoulé, un dialecte ivoirien, et de « work » qui signifie « travailler » en langage des affaires.

Akwaban’work est plus qu’un joyeux mot d’accueil. Marie-Karelle, tout juste 29 ans, diplômée des meilleures écoles françaises, passée par Orange, TF1 ou encore Carrefour, veut créer un véritable mouvement construit autour de la valeur travail. Sans ambages, elle affirme vouloir rechercher « des cerveaux formés dans des institutions internationales de renom ayant acquis leurs diplômes et/ou une expérience professionnelle à l’international », affiche cette entrepreneuse, mère d’un enfant.

Pour trouver des talents prêts à rentrer en Afrique, elle joue avant tout sur les codes actuels du marketing, les réseaux sociaux : LinkedIn, qui fait la course en tête sur le continent africain, Viadeo, Twitter et Facebook. Mais son arme secrète n’est pas seulement un carnet d’adresses des meilleures entreprises internationales et africaines qui sont sur place, c’est aussi l’information professionnelle. Ainsi, un service vidéo va régulièrement à la rencontre des leaders économiques africains pour en savoir plus sur leur vision, leurs besoins, leurs parcours. On retrouve aussi sur le site des questions pratiques, des fiches métiers, etc. Et ça marche !

Akwaba’nWork mise aussi sur la réalité des rencontres traditionnelles. Ces échanges se font à travers les Africa Meet & Job, série d’événements networking qui ont lieu en Afrique et à Paris. À l’occasion de l’une de ces rencontres qui a lieu le 24 mars dernier, autour du publicitaire, PDG du groupe Voodoo, Fabrice Sawegnon, dont on dit qu’il est un faiseur de rois pour avoir fait élire plusieurs présidents africains, elle dévoile au Point Afrique les défis du recrutement dans la sous-région ouest-africaine.

Quelles sont les problématiques de recrutement auxquelles vous êtes confrontée aujourd’hui en Côte d’Ivoire ?

Nous avons, d’une part, les entreprises qui sont de plus en plus à la recherche de profils spécialisés. Dans un contexte où la Côte d’Ivoire vise un objectif d’atteinte de l’émergence à l’horizon 2020, les enjeux des structures publiques et privées sont de plus en plus importants et nécessitent des experts évoluant sur le marché occidental. Notre challenge est de pouvoir identifier ces personnes capables de répondre à ce besoin et de les proposer à ces structures.

Quels sont les secteurs d’activité les plus dynamiques en ce moment ?

Dans un sens plus large en Afrique Subsaharienne, les secteurs d’activité où l’on observe une hausse de la demande de talents sont le BTP, les nouvelles technologies de l’information et l’audit finance.

De quels types de profil les entreprises implantées sur place ont-elles besoin ?

Les entreprises implantées sur place ont besoin de profils pour des fonctions managériales issus de formations internationales avec un niveau minimum bac + 4 ou 5. Pour des fonctions classiques, l’accent sera notamment mis sur l’expérience et la capacité à être rapidement opérationnel dans un métier.

Comment le secteur du recrutement dans le pays et dans la sous-région se structure-t-il?

Le recrutement en Côte d’Ivoire et dans la sous-région s’effectue par le biais d’agences de recrutement ou par le biais des directions des ressources humaines de chaque entreprise. Il n’est pas sans dire que la cooptation est très prisée et réduit les chances des personnes résidant à l’étranger qui souhaitent postuler à des offres locales.

Pourquoi est-ce important pour vous d’alimenter les candidats en informations professionnelles (vidéos, conseils, fiches métiers, etc.) ? Est-ce un bon moyen de créer un écosystème durable ?

L’information et la communication sont des éléments de plus en plus présents autour de toutes les activités, notamment au vu de la progression et de la démultiplication des supports digitaux. Il est ainsi nécessaire d’accompagner les talents et les entreprises vers leur rencontre à travers ces canaux afin de contrôler, voire d’améliorer, l’image véhiculée, et c’est cela qui nous permet de nous différencier des cabinets de recrutement existants. Nous avons la chance, je dirais, d’avoir préparé l’entrée de Akwaba’nWork sur le marché depuis plusieurs années, ce qui nous vaut une pleine autonomie financière. En effet, nous ne bénéficions d’aucune aide de l’État, mais nous tenons à souligner que ce dernier est parmi nos clients et nous nous réjouissons déjà de cela. Encore faut-il que plus d’entreprises nous fassent confiance de la même façon afin de soutenir et de renouveler les dispositifs de recrutement.

De quelles informations les candidats disposent-ils ? Comment toucher directement les potentiels ?

Sur notre plateforme, les candidats peuvent nous déposer directement leur CV ou postuler directement aux offres d’emploi à pourvoir. Par la suite, nous les contactons pour un entretien au sein duquel nous leur détaillons l’opportunité identifiée. Nous utilisons beaucoup les réseaux sociaux et nous multiplions les partenariats avec les grandes écoles, universités et associations via les ambassades à l’étranger pour répertorier de forts potentiels.

Quelles sont les différences de profil entre les cadres formés à l’extérieur, ceux de la diaspora, et ceux qui sont restés sur le continent ?

Nous partons du principe que tous les profils sont identiques. La différence intervient de par l’exposition aux procédés et langues internationales qu’offre une formation ou une expérience à l’étranger.

Comment attirer et garder les leaders de la diaspora ?

Nos candidats ont une exigence récurrente concernant le maintien de la qualité de vie dont ils disposent à l’étranger. Cela peut se traduire par un salaire parfois similaire ou par une prime de dépaysement. D’autre part, ils sont aussi conscients des perspectives rapides d’évolution compte tenu des environnements constamment en progression en Afrique.

Quels défis pour que ceux qui sont restés sur place trouvent aussi des offres d’emploi qualifié ?

Les opportunités sont accessibles lorsque la formation et/ou l’expérience y sont. Mettre toutes les chances de son côté à travers une expérience académique ou professionnelle à l’étranger peut s’avérer être un excellent investissement. Tenant compte du fait que cela peut s’avérer coûteux j’aurai pour conseil de solliciter les structures d’État qui octroient des bourses ou les organisations internationales qui multiplient les programmes de jeunes diplômés ou de jeunes professionnels (Yali, Tony Elumelu Foundation Entrepreneurship Programme, Give1Project, etc.).

Source: Marie-Karelle Koné : « Notre challenge est d’attirer les meilleurs profils »