
Au Burundi, le tambour est plus qu’un instrument de musique. C’est un symbole de royauté, profondément ancré dans la culture. Inscrits en novembre 2014 au patrimoine immatériel de l’humanité de l’UNESCO, les tambours du Burundi sont désormais présentés au monde entier comme l’un des éléments les plus précieux du pays.
En Kirundi, langue nationale du Burundi, les tambours sont appelés «ingoma», un terme qui signifie «tambour» et «royaume». Le choix de cette nomination remonte au temps du royaume millénaire du Burundi («ingoma y’uburundi» en kirundi). Ainsi, le tambour sacré ne pouvait être utilisé que par des ritualistes et ses sonorités n’étaient entendues que lors de circonstances exceptionnelles.
«Le tambour, c’était le symbole du pouvoir royal. Ce n’était pas une petite chose banale comme aujourd’hui. Dieu passait par le tambour pour protéger la monarchie et le royaume, l’ensemble du pays.» – Abbé Adrien Ntabona, anthropologue burundais
L’une de ces occasions spéciales était la célébration d’«umuganuro», la fête annuelle des semailles, qui consistait à garantir la paix entre le roi et son peuple.
«Là où l’on joue du tambour, c’est qu’il y a la paix.» – Proverbe kirundi
Si depuis 1966, le Burundi est devenu une République, le tambour demeure un symbole sacré, qui représente encore la culture, l’histoire et la paix aux yeux des Burundais. De plus, la particularité de cet instrument se trouve dans le fait que le batteur doit adapter son rythme au danseur, contrairement aux autres types de musiques où c’est le danseur qui doit calculer ses mouvements en fonction des sonorités qu’il entend.
Considérée comme un vestige d’une valeur inestimable, l’utilisation du tambour s’est néanmoins beaucoup démocratisée au cours des dernières années. Un phénomène considéré comme une dérive pour les autorités burundaises. De fait, le 20 octobre dernier, le président Pierre Nkurunziza a signé un décret visant un contrôle strict de cet objet sacré, souvent utilisé lors de mariages, remises de diplômes, baptêmes ou autres festivités. Le chef d’État burundais considérait que, dans de telles circonstances, la sacralité du tambour n’était pas respectée. Désormais, tous ceux qui voudront l’utiliser en dehors des cérémonies officielles devront disposer d’une autorisation de ministre de la Culture.
« Notre ambition est de faire retentir la culture burundaise et de l’inscrire dans une dynamique d’un Burundi qui se bat contre les représentations caricaturales le présentant comme un pays à la dérive. Nous voulons contribuer à attirer sur le Burundi un regard équilibré, qui sait reconnaître les défis que ce pays doit relever, mais aussi les valeurs positives qu’il ressert ». Antime Baranshakaje, ancien tambourinaire du roi du Burundi
Ainsi, cette réglementation s’inscrit certainement dans l’idée de préserver cet objet sacré de toute utilisation jugée illégitime.
En outre, on ne peut évoquer le Burundi sans mentionner son précieux tambour, tant celui-ci représente une fierté nationale, un vécu commun et désormais une partie du patrimoine mondial.