
Envoyer du crédit d’appel sur les téléphones prépayés de vos proches. En Afrique et partout ailleurs. C’est le principe de la plateforme digitale «Ewala», lancée récemment à Bruxelles. Rencontr avec ses concepteurs.
C’est dans les locaux de Co-Station Brussels (écosystème pour les entreprises de l’ère numérique) que Stéphane Ugeux, 27 ans (métis belgo-burundais), et Sinouhe Ferreira Monteiro Nunes (Né d’un père moitié portugais, moitié angolais et d’une mère moitié belge, moitié burundaise) ont développé leur projet Ewala. Ce nom original est issu d’une combinaison de jeu de mots qui peut aussi bien être traduit en français par «Et voilà» ou en anglais par «E-wallet» (portefeuille électronique). «Nous sommes une start-up multiculturelle qui vise plusieurs pays et le nom Ewala sonne bien dans presque toutes les langues», expliquent les deux associés qui, en juin 2016, ont remporté le concours «Microsoft Innovation Center Boostcamp Grand Prize». «Participer au Microsoft Bootcamp nous a apporté de la visibilité, la crédibilité du projet et nous a aidés à l’affiner ainsi que de construire un business plan». Par ailleurs, le magazine belge «Trends tendance» a également classé «Ewala» dans la liste des startups à surveiller en 2017. Stéphane Ugeux et Sinouhe Ferreira ont également pris une part active au forum «Sultani Makutano», qui a réuni des entrepreneurs africains à Kinshasa en septembre 2016.
Créer un produit lié au téléphone
C’est en 2015 que les deux amis, qui ont toujours souhaité réaliser un projet ensemble, ont commencé à réfléchir à leur projet. «On a commencé à faire du brainstorming sur l’idée en 2015, parce qu’on cherchait tous les deux à réaliser un projet ensemble», explique Sinouhe Ferreira Monteiro Nunes, diplômé en relations internationales et politiques globales à l’université américaine de Rome et également détenteur d’un diplôme en business international. Stéphane Ugeux est, pour sa part, détenteur d’un master en Commerce. Mais avant d’entamer le cursus de ce master, il a eu l’opportunité de séjourner au Burundi pendant un an, où il a travaillé pour le compte d’un opérateur téléphonique. «Je me suis rendu compte de toutes les mouvances autour des produits liés au téléphone notamment M-Pesa. On a ainsi discuté de la manière d’utiliser tous ces nouveaux systèmes en vue de créer un produit qui plaise à beaucoup de gens. Finalement nous nous sommes focalisés sur le transfert d’argent. On a travaillé sur le projet du mois de janvier jusqu’au mois de juin. Au mois de juin, nous avons décidé d’opter d’abord pour le transfert de crédits d’appel», explique Stéphane Ugeux. Ce choix, fait savoir Sinouhe Ferreira Monteiro Nunes Sinouhe, se justifie par le fait que le crédit d’appel, plus communément appelé «airtime», peut être utilisé de différentes manières. «En le recevant, on peut l’échanger contre de l’argent. Dans certains pays, comme le Zimbabwe par exemple, le airtime est devenu quasiment une monnaie parallèle. On s’est donc dit qu’on devait commencer avec ça parce que c’était beaucoup plus simple et que ça nous donnait une base de clients», explique-t-il. L’airtime envoyé peut également être converti en data internet à des fins d’utilisation pour whatsapp, facebook, viber, skype, etc. «Le airtime a beaucoup d’avantages. Ça coûte plus cher d’appeler de la Belgique vers l’Afrique que de l’Afrique vers la Belgique. C’est mieux d’envoyer du crédit d’appel et se faire rappeler. Si la personne dispose d’un Smartphone et n’a pas accès à un réseau Wifi, elle peut convertir ces crédits en méga internet», précise Stéphane Ugeux.
Processus rapide et automatisé
Pour envoyer le crédit d’appel à un destinataire à travers le site internet d’Ewala, l’utilisateur doit insérer le numéro du destinataire, choisir un montant proposé et payer soit avec une carte de débit, de crédit, PayPal ou encore un code Ewala, disponible sur les cartes à gratter Ewala. Les utilisateurs ont désormais la possibilité d’obtenir une recharge Ewala directement le site en utilisant une carte de débit. Le téléphone du destinataire est automatiquement rechargé et le montant affiché inclut les frais de transfert. Grâce à un processus rapide et automatisé, le bénéficiaire reçoit le crédit une fois l’opération validée. Ewala, selon ses concepteurs, collabore déjà avec plus de 400 opérateurs dans plus de 120 pays, dont 38 en Afrique.
Transfert d’argent vers le téléphone mobile
Dans un deuxième temps, Ewala se propose de fournir un service de transfert de fonds via le téléphone portable à travers le monde, notamment en Afrique où ce procédé se développe rapidement. «Transférer de l’argent est un des liens qui existe aujourd’hui entre la diaspora et l’Afrique. Beaucoup de personnes envoient de l’argent à leurs familles. Les frais se situent actuellement entre 8% et 15 % alors qu’il y a moyen d’offrir le même service, avec la meilleure qualité possible, à des frais beaucoup plus abordables. Je ne vois pas pourquoi on devrait continuer à payer cher. Les frais chez Ewala se situent, eux, aux alentours de 6%», argumente Stéphane Ugeux. Pour sa part, Sinouhe Ferreira précise que 6% constitue le maximum mais qu’avec le mobile money notamment les frais sont beaucoup moins chers. «Ça dépend de la technologie à laquelle la personne veut accéder», note-t-il. Le service de transfert des fonds devrait être opérationnel durant l’été et les deux associés visent, pour un début, entre 5.000 et 10.000 utilisateurs par mois. «On ambitionne d’être la première plateforme de confiance en Belgique auprès des utilisateurs qui envoient de l’argent à l’étranger. Dès qu’on aura une licence internationale pour le transfert d’argent, on pourra le faire dans plusieurs pays au monde», conclut Sinouhe Ferreira Monteiro Nunes.