
Dans le sud du pays, les réserves de Selous et Ruaha recèlent une Afrique inexplorée et permettent des safaris inoubliables.
Un ruban de terre barrant le bush, une baraque de 3 mètres carrés qui frit sous la tôle et trois girafes déployant leurs échasses avec la grâce de danseuses étoiles : avant même de poser le pied sur la piste de l’aérodrome de brousse de Siwandu, l’Afrique est là. Colossale, farouche, haleine brûlante et manières de paradis. « L’Afrique était puissante, écrit Le Clézio dans L’Africain. Sa violence était générale, indiscutable. » Il doit être 18 heures. Soleil roux, brume de chaleur, canopée froissée, baobabs millénaires empanachés d’aigles pêcheurs et silhouettes sombres et cornues, Kessel, Blixen, Redford et Disney… dix minutes de Land Rover et tous les clichés africains crânent déjà sous nos yeux. Shootés, d’entrée. Sauf que la photo est vivante : l’éléphant bouge. Il nous observe, perplexe, et bientôt nous fera dans une (demi-) charge la démonstration de sa puissance. Nous ne sommes pas sur la couverture du National Geographic ou dans un immense jardin zoologique, mais dans l’un des derniers sanctuaires de vie sauvage au monde. Et si d’aventure cette conscience du « wild », comme disait London, nous échappait, juste un instant, au long de notre exploration, l’interdiction formelle de se déplacer seul dans les camps après la tombée du jour, le sifflet dans le tiroir de la table de chevet et les rondes de guerriers masais chaque nuit autour de nos tentes rafraîchiraient nos mémoires : nous sommes chez eux. C’est rare, intimidant et fabuleux.

Eden
Lorsqu’on pense à la Tanzanie, c’est le Kilimandjaro, le Serengeti, le somptueux cratère du Ngorongoro qui sautent à l’esprit. Nous en sommes loin. Plus au sud, dans la réserve de Selous, l’une des plus vastes et des plus protégées d’Afrique australe, accessible uniquement en avion-taxi. 55 000 kilomètres carrés (près de 4 fois la superficie du Serengeti), 60 000 éléphants, 200 000 buffles, la plus grande population d’hippopotames du pays, lions, crocodiles, zèbres, koudous, meutes de chiens sauvages et près de 450 espèces d’oiseaux planant au-dessus des bras morts de la rivière Rufiji qui abreuve l’éden d’est en ouest : voilà pour les chiffres. Sur la rive du lac Nzerakera, on distingue à peine les tentes de Siwandu, tant elles se diluent dans le bush. À l’intérieur, tout est discrètement beau, des coffres masais au lin des draps en passant par les douches en plein air ou le parquet des terrasses avec vue sur la beauté du monde.
Lire la suite. Source: Évasion : out of Tanzania