
L’Afrique, c’est chic. Ce n’est pas Bernie Seb, Juliana Baltazar ou Môsieur Manga qui diraient le contraire. Le premier est un créateur burkinabé. Cet ex-financier basé à Paris a récemment lancé sa marque vestimentaire, De La Sébure. Elle «brise les codes» et fait la part belle aux mannequins albinos.
Juliana Baltazar a remporté le titre de Miss Suisse Afrique 2017. La Valaisanne d’origine angolaise est aussi l’ambassadrice de l’aide de la Confédération contre le sida. Môsieur Manga est lui blogueur prisé des marques qui ciblent la mode au masculin. Le Fribourgeois d’origine gabonaise déclare gagner au minimum 700 euros par semaine par le truchement des réseaux sociaux et de la publicité.
Tous trois se sont rendus à Genève ce week-end, où se déroule chaque printemps depuis trois ans l’Afrodyssée, «le marché international des tendances africaines». L’événement s’est tenu dans une tente au sein du parc Barton, derrière la Perle du Lac.
Partenariat avec l’ONU
Une cinquantaine de créateurs et entrepreneurs du continent ou de sa diaspora ont été invités. Tous sont dans la mode, l’art ou le design et sont venus pour vendre et se faire connaître.
Des photographes et des éditeurs étaient également de la partie, des ateliers ont été organisés. Vendredi et samedi soir ont été les théâtres d’un défilé de mode. Des débats – sur les médias et les minorités et l’afro-féminisme – ont accompagné le «grand marché» au sein d’un bâtiment du Graduate Institute, une institution partenaire. L’événement s’est également associé avec les Nations Unies, qui ont érigé en thématique pour la décennie à venir les «personnes d’ascendance africaine».
En Europe, Afrodyssée se serait érigé comme un événement phare du secteur, selon ses organisateurs. Aux côtés de la African Fashion Week, à Londres, d’Ethno Tendance, à Bruxelles, de la Natural Hair Academy de Paris et, à Lisbonne, de la Black Fashion Week. «Afrodyssée s’inscrit dans une dynamique de découverte d’un art qui sort des sentiers battus», indique Vincent Jacquemet, son organisateur valaisan par sa mère et ivoirien de par son père. «Mais l’objectif est aussi que les gens fassent du shopping, qu’il y ait des retombées économiques», dit-il.
Du shopping, Juliana Baltazar connaît. Elle dit facilement consacrer une heure pour essayer une tenue. Elle dit également «être très contente de voir tant d’entrepreneurs africains s’épanouir». Quelque 2500 visiteurs étaient attendus pour l’occasion, comme elle; selon les organisateurs, ils devraient générer un chiffre d’affaires autour de 150’000 francs. Parmi eux, une majorité de membres de la diaspora africaine genevoise, mais aussi de l’arc lémanique, de Zurich et de France et quelques ambassadeurs de nations africaines installés à Genève.
Grosse affluence en ligne
Beaucoup ont été attirés par une armée d’influenceurs du Web, signe que les nouveaux canaux de la publicité sont maîtrisés par les designers du continent noir. Sur les réseaux, le hashtag (mot-clé servant de référence à une thématique donnée) #Afrodyssee suscitait des vagues en Suisse, à Paris, en Europe, au nord et au sud du Sahara mais également à Istanbul, où figure une importante partie des quelque 350’000 abonnés de Môsieur Manga.
La troisième édition de ce marché des tendances africaines aurait dû se tenir dans l’espace Hippomène, mais la récente arrivée de la haute école de design genevoise, la HEAD, dans le bâtiment du parc Hentsch a bouleversé les plans et poussé Afrodyssée aux abords du Léman. Où se tiendra la quatrième édition? Nul ne sait encore mais une chose paraît certaine: il faudra toujours plus de place car l’événement gagne en importance chaque printemps. (TDG)
Par Richard Etienne
Tribune de Geneve
Source : L’Afrique de la mode s’est donné rendez-vous à Genève