Réussir une campagne de crowdfunding en Afrique, c’est possible. C’est ce que prouve l’expérience du Bastion, une salle de concert au Sénégal, dont le gérant, Erwan Le Vigoureux, a lancé un appel aux dons, en vue de rénover ce lieu sacré de la scène underground dakaroise.

A la date du 17 janvier 2018, sur le site de financement participatif KissKissBankBank, la campagne « Sauvons Le Bastion, salle de concert et lieu unique à Dakar ! » affichait l’impressionnante somme de 15 981 €, soit 7% de plus que son objectif initial. Lancée il y a un peu plus d’un mois, cette campagne a réussi à fédérer toute une communauté d’ambassadeurs de la culture du Sénégal et d’ailleurs.

 

Plus qu’une salle de concert, le Bastion, c’est un carrefour de sonorités. Situé dans le quartier populaire de Ouakam, dans une maison témoin, vieille de 40 ans, ce lieu doit certainement son succès aux Dakar Live Sessions, un programme qui permet aux artistes sénégalais et internationaux de créer des moments suspendus hors du temps, en partageant la même scène l’espace d’une soirée.

 

Les concerts les plus mémorables ont ainsi compté les participations du célèbre batteur nigérian Tony Allen, cofondateur de l’afrobeat, du saxophoniste haïtien Jowee Omicil, du chanteur et musicien sénégalais Cheikh Lô, du légendaire Orchestra Baobab ou encore de Noura Mint Seymali, surnommée la « Janis Joplin » de Mauritanie.

« C’est l’échange d’énergies qui fait le succès d’un concert ». – Erwan Le Vigoureux

Seulement, en septembre 2017, pour la deuxième fois, un plafond du Bastion s’effondre. Un événement qui met Erwan Le Vigoureux, gérant et programmateur de la salle, face à l’urgence : il faut réhabiliter ce temple de la culture. Sa casquette d’activiste culturel bien enfoncée sur la tête, il décide de tenter l’aventure du crowdfunding. Avec un budget s’élevant à 15 000 €, la route s’annonce cahoteuse mais certainement pas impraticable.

Son plaidoyer étant orienté sur le besoin de préserver et chérir les lieux de culture, la campagne du Bastion a mobilisé fans, influenceurs et toute autre personne ayant une histoire avec ce lieu. D’après le gérant, pour réussir une campagne de financement participatif, il faut jauger avec minutie la quantité d’acteurs pouvant se rallier à votre cause. Avant même de lancer un appel aux dons, ceux-ci doivent ainsi être sollicités et motivés, de sorte à communiquer leur intérêt à leur entourage.

« Il faut se battre pour préserver les lieux de culture ». – Erwan Le Vigoureux

A bien des égards, le crowdfunding fait penser à un sprint mais c’est aussi et surtout une course d’endurance où les participants doivent être stimulés pour tenir jusqu’à la dernière ligne droite. En outre, la campagne doit être accompagnée de supports de communication attractifs qui refléteront fidèlement la progression vis-à-vis de l’objectif. Bien entendu, pour séduire, votre projet doit être, avant tout, bien construit, convaincant et vecteur d’un message fort.

Les travaux peuvent donc commencer au Bastion, Erwan Le Vigoureux souhaitant mettre le bâtiment aux normes internationales de sécurité. Cela dit, la quête de financement bat toujours son plein, la rénovation d’une telle maison nécessitant bien plus que la somme initiale de 15 000 €. Quoi qu’il en soit, en 2018, le Bastion compte offrir un programme d’autant plus riche et innovant, avec en perspective une participation à la Biennale des Arts de Dakar. Pour la prochaine affiche, le programmateur confie avoir contacté le trompettiste togolais Daniel Dzidzonu.

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Tenant ferme sur ses pieds malgré le poids du temps, le résilient Bastion abrite également la seule boutique de disques vinyles de la capitale sénégalaise, un studio d’enregistrement et un bar où se raconte la vie en toute convivialité. Dans ce lieu unique, on peut voyager au gré des musiques alternatives, tout en célébrant Dakar, ville créative en pleine effervescence.